Introduction
Écrire sur PET SOUNDS, plus de quarante ans après sa sortie officielle, au printemps 1966, n’est pas chose facile. Écrire sur soi non plus.
Trop de clichés, répétés ad nauseam, ont simplifié le discours critique.
Entre autres : « PET SOUNDS est peut-être le meilleur album de tous les temps » ; « Brian, génie perturbé de la fratrie Wilson, est devenu fou après cinq années de production intensive passées au service de Capitol Records (1962-1967) » ; « passé le pont, les fantômes vinrent à sa rencontre », est-il écrit sur les intertitres d’un classique du cinéma muet. « Devenu incapable du moindre effort créatif, il végètera pendant plusieurs décennies, avant de revenir inexplicablement, et quasiment sans mot dire, sur le devant de la scène. »
Pourtant, tout ce que vous venez de lire est (presque) vrai. Reprenons donc.
PET SOUNDS est l’album le plus fameux des Beach Boys, arrivant régulièrement en tête (ou juste derrière le sergent Poivre) des classements des meilleurs disques pop/rock de tous les temps. Chef d’œuvre de Brian Wilson, le fondateur, leader, compositeur et producteur du groupe, l’album a passé l’épreuve du temps sans souci. Sorti chez Capitol Records au mois de mai 1966, il pourrait aussi bien avoir été conçu vingt ou quarante ans plus tard. Si PET SOUNDS n’a pas rencontré à sa sortie le succès commercial des productions passées des garçons de la plage, il représente néanmoins l’achèvement artistique de son auteur, son opus magnum, et, pour ses pauvres concurrents, la parfaite illustration du mythe de Sisyphe. Mais ce triomphe musical, cet achèvement, est aussi (et surtout) le début d’un long déclin personnel, Brian Wilson cessant doucement toute activité après la débâcle de SMILE en 1967. Processus de disparition, d’évanouissement, qui rappelle le chemin emprunté par Syd Barrett, premier chanteur et fondateur de Pink Floyd.
Après trente ans d’errance, Brian Wilson est finalement revenu au premier plan, faisant mentir F. S. Fitzgerald (« il n’y a pas de second acte dans la vie d’un Américain »). PET SOUNDS fera tout d’abord l’objet, en 1997, d’une exceptionnelle réédition, censée fêter le trentième anniversaire (plus un) de l’album. Le coffret THE PET SOUNDS SESSIONS, soit plusieurs heures nous plongeant au cœur de sa création, demeure l’une des plus belles rééditions des années CD, dont on nous annonce la fin. Bien mieux, Brian, après avoir bravé sa légendaire peur panique des apparitions publiques, est remonté sur scène à la fin des années quatre-vingt dix et a fini, en l’an 2000, par présenter PET SOUNDS live, dans toute sa majesté, sous le regard parfaitement incrédule d’admirateurs enfin récompensés après tant d’années d’attente. PET SOUNDS, l’achèvement de Brian Wilson raconte l’histoire de cet album unique, s’attache à comprendre ses origines profondes, à faire intimement revivre sa conception, puis à mesurer son influence.
Avant d’entrer dans le vif du sujet, qu’il nous soit permis de rappeler qu’il fut un temps où un album 33 tours (ou long player) était un bel objet, avec une pochette cartonnée et un disque de vinyle noir. Au milieu des années quatre-vingt, le compact-disc s’est imposé (CD laser-disc, disait-on sans peur du ridicule). L’industrie musicale a prétendu, à tort, que nous étions en présence d’une incroyable innovation technologique, alors que le nouveau format était en réalité sans aucun attrait esthétique, d’une durée souvent éprouvante, et plus triste, dénué de toute charge émotionnelle. Cela peut sembler curieux mais il était fréquent d’examiner sous toutes ses coutures la pochette d’un disque 33 tours (et même d’un 45 tours !) avant de le poser sur sa platine. Allongé sur son lit, on pouvait ainsi passer des heures à détailler les photos illustrant LONDON CALLING ou déplier, replier, puis déplier une nouvelle fois 461 OCEAN BOULEVARD. À l’heure où nous écrivons ces lignes, le CD semble lui aussi s’apprêter à rejoindre le disque vinyle au musée des arts anciens, la musique s’écoutant désormais essentiellement via l’internet, sous forme de fichiers copiables et transférables à l’infini. Ironie de l’histoire, alors que le 45 tours n’est plus qu’un souvenir lointain, nous voyons se développer de nouvelles cultures musicales reposant sur la diffusion et l’achat de titres uniques, cultures totalement déconnectées de la notion d’album telle que nous l’avons connue depuis la fin des années cinquante.
La masse de chansons disponibles (et téléchargeables) paraissant sans limite, on recommandera de garder à ses côtés, au milieu de ce maelström, quelques classiques (finalement, peu : « Revolver », « Paris 1919 », « GP » et après ?)… et de suivre une ou deux règles de vie, si ce n’est de morale. « Back to Mono » est-il écrit dans les écritures saintes de l’évangile selon Phil Spector. Plus simplement encore, « Back to PET SOUNDS ».
© 2007, Autour du livre.
3 reviews for Pet Sounds
4.67
/5Based on 3 rating(s)
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Annie D.
Correspond à mes attentes. Complément indispensable pour qui aime les beach boys.
Reginald ROY
Excellente synthèse sur le chef-d’oeuvre de Brian Wilson avec une bibliographie limitée mais pertinente.
Volume de petit format agréable à manipuler.
OMBRAGE (Montreuil-sous-Bois)
Grand livre sur un grand disque.
L’auteur connait la question et a rédigé là un bon document bien informé sur un disque réussi et important sur un groupe avec lequel j’ai grandi et que j’adore.
A lire pour les fans …. et les autres